La biomédicalisation de la prévention

Ce projet est financé par l’ANRS, il est hébergé par l’IRIS-EHESS.

La décennie 2000 a vu s’affirmer, à l’échelle internationale, de nouveaux enjeux de prévention du VIH, caractérisés par leur forte dimension biomédicale. Dans le contexte français, deux technologies de gestion du risque et de la santé sont particulièrement visibles : le dépistage rapide et l’usage préventif d’antirétroviraux. Tout en suscitant de nombreux espoirs – mieux contrôler l’épidémie et assurer une meilleure qualité de vie pour les personnes concernées – ces évolutions de la prévention génèrent des tensions et renouvellent les débats sur la prévention.

En effet, si ces approches bénéficient d’un haut niveau de preuve scientifique, leurs appropriations et leurs usages en dehors des contextes de recherche restent difficiles à évaluer. Ce projet de recherche se propose donc d’apporter une contribution sociologique à l’analyse de ces transformations des paradigmes de la prévention autour de deux axes principaux : 1) l’analyse des reconfigurations des réseaux d’acteurs (associations, institutions, professionnels de santé et chercheurs) autour des enjeux de prévention ; et 2) l’étude des appropriations concrètes de ces nouveaux outils et de leurs effets sur les subjectivités.

Ce projet collectif, subventionné par l’ANRS, coordonné par Marc Bessin (CNRS/Iris), auquel participe Maud Gelly (CSU), Gabriel Girard (Iris) et Mathieu Trachman (Iris) articule trois chantiers de recherche :

  • Le premier s’attache à étudier les pratiques de dépistage rapide, et notamment les enjeux du dépistage « communautaire » ou « démédicalisé » porté par AIDES. Que changent ces appropriations associatives d’un outil biomédical ?
  • Le second chantier concerne la diversification des usages des antirétroviraux. Quelques années après l’annonce du Pr Hirschel, et dans le contexte de l’essai Ipergay, dans quelle mesure l’approche du « traitement comme prévention » transforme-t-elle la gestion du risque et les manières de vivre la maladie ?
  • Enfin, le troisième des chantiers de ce projet concerne l’appréhension du risque et questionnera les processus d’élaboration de normes individuelles et collectives de prévention dans un contexte de diversification des outils. Quelles stratégies élaborent aujourd’hui les gais séronégatifs régulièrement exposés au risque VIH ?

La caractéristique de notre projet est de s’appuyer sur des méthodologies qualitatives. En mettant en lien ces trois chantiers il vise à augmenter la pertinence de recherches trop souvent conduites de manière isolée. De manière transversale, ce projet met en œuvre une approche de sciences sociales soucieuse du dialogue avec les autres disciplines scientifiques et plus largement avec le monde de la lutte contre le sida.