La XXIe Conférence internationale sur le sida s’est ouverte le 18 juillet à Durban, en Afrique du Sud. Organisées tous les deux ans, ces grandes conférences permettent de faire le point sur l’état des réponses publiques et communautaires en ce qui concerne cette épidémie mondiale. Cette tribune a été publiée sur le site La Presse + et dans les pages du Devoir. Elle est inspirée d’un texte rédigé plus tôt cette année.

Et si la réponse au VIH/sida à Montréal (et au Québec) passait par un engagement clair des villes québécoises, en concertation avec les autres acteurs ?

D’après les dernières données épidémiologiques, 36,7 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde, et 1,9 million sont infectées chaque année. Les avancées dans le domaine médical et dans celui de la prévention permettent cependant d’envisager la fin de l’épidémie à l’horizon de quelques décennies.

Mais toute bonne stratégie nécessite un plan d’intervention à l’échelle locale et/ou régionale. C’est l’ambition de la mobilisation lancée fin 2014 par l’ONUSIDA en partenariat avec plusieurs grandes villes du monde. L’initiative des « Villes sans sida » part d’un constat simple : d’ici 2030, près de 60 % de la population mondiale vivra dans des zones urbaines. Et dans de nombreux pays du monde, l’épidémie de VIH est concentrée dans ces aires géographiques.

Impliquer activement les villes apparaît comme une condition sine qua non de la réponse globale à l’épidémie. L’objectif est de coordonner les actions de lutte contre le VIH au niveau des villes, de renforcer les moyens et de bâtir de meilleures synergies entre les acteurs communautaires, publics et médicaux. D’ores et déjà, plusieurs métropoles, sur plusieurs continents, ont pris des engagements en ce sens, notamment Bamako, Bangkok, Bucarest, Curitiba, Durban, Paris, New York, Genève, Port-au-Prince ou San Francisco. Montréal fait malheureusement figure de grande absente sur cette liste…

Certes, Montréal n’est ni Durban ni San Francisco, en matière d’épidémie. Mais d’après l’INSPQ, la métropole concentre les deux tiers des 350 nouvelles infections annuelles au Québec. L’épidémie est toujours active, en particulier dans la communauté gaie. La réduction radicale du nombre de nouvelles infections constitue donc bien, ici aussi, une priorité de santé publique !

Outils

Pour mener à bien cette réponse au VIH/sida, les outils sont connus : faciliter l’accès au dépistage rapide, aux préservatifs, à la prophylaxie préexposition et aux traitements antirétroviraux ; ouvrir des centres d’injection supervisée ; élargir l’offre de santé sexuelle pour les communautés les plus touchées ; lutter activement contre les discriminations et la sérophobie.

Au regard des priorités de santé publique, le Québec bénéficie de lignes directrices précises : le Plan stratégique 2015–2020 du ministère de la Santé et des Services sociaux place le dépistage des ITSS comme une priorité ; le Programme national de santé publique 2015–2020 pose explicitement que : « Certains groupes de la population sont plus touchés que d’autres, soit à cause de leur vulnérabilité sociale, soit parce qu’ils adoptent des comportements ou des habitudes de vie plus risqués. Ainsi, les services sont définis de manière à mieux répondre aux besoins de l’ensemble de la population, mais avec une intensité plus grande dirigée vers les groupes vulnérables au regard des ITSS. »

Les acteurs de la mise en oeuvre et du suivi de ces outils sont également clairement définis. À Montréal, l’offre est très diversifiée : services communautaires, cliniques, SIDEP, services hospitaliers, etc. Mais elle reste mal connue des principaux concernés, comme l’ont démontré des chercheurs de l’UQAM. Fin 2015, une coalition intersectorielle de chercheurs, d’organismes et de professionnels de la santé s’est constituée pour envisager une réponse provinciale à l’épidémie.

Résumons : les outils d’intervention sont connus et disponibles, les stratégies sont sur la table, les acteurs sont mobilisés… seules manquent une coordination des actions et une impulsion politique plus audacieuses. Comme le démontre l’expérience du « Réseau des villes et villages en santé », la mobilisation des acteurs locaux est un atout formidable pour améliorer la santé des populations. Et si la réponse au VIH/sida à Montréal (et au Québec) passait par un engagement clair des villes québécoises, en concertation avec les autres acteurs ?