Je reproduis ici le texte d’opinion qui a été publié dans le quotidien La Presse, le 5 mai dernier. Bonne lecture !

La santé des populations ne doit pas être sacrifiée au nom de l’austérité budgétaire ou de la morale

Dans la lutte contre le VIH, l’heure est à l’optimisme. Comme le soulignait La Presse dans son édition du 2 mai, l’usage des traitements antirétroviraux comme prévention ouvre de nouvelles possibilités pour enrayer l’épidémie. La Prophylaxie pré-exposition (PrEP) répond par exemple aux besoins des personnes en difficulté avec l’utilisation régulière du condom. Du côté des personnes séropositives, il est à présent établi que les traitements anti-VIH réduisent radicalement le risque de transmettre le virus à leurs partenaires.

Grâce aux recherches menées, on connaît mieux l’efficacité de la PrEP, et ses conditions optimales d’utilisation. La recherche « Ipergay », menée en France et au Québec, a ainsi permis d’étayer l’efficacité de la PrEP chez les hommes gais. En ce sens, les progrès dans le domaine de la prévention du VIH soulignent l’importance d’appuyer les politiques de santé publique sur les preuves scientifiques.

Or, le paradoxe de notre époque, c’est que la santé publique est fragilisée au Québec et au Canada.

Au niveau fédéral, les politiques mises en œuvre sapent directement les conditions de vie des communautés vulnérables au VIH. Par exemple, les travailleurs et travailleuses du sexe voient leur situation menacée par des politiques répressives. Pourtant, l’histoire l’a démontré, la sortie de la clandestinité et de la précarité est une condition de la réussite des campagnes de prévention du VIH. Dans un autre domaine, les sites d’injection supervisés ont largement fait la preuve de leur utilité en termes de santé publique. Pourtant, le gouvernement Harper refuse toujours de les soutenir.

Au Québec, les coupes budgétaires affectent très directement la santé publique, remettant en cause un champ d’action qui a fait ses preuves. 30 % de réduction des budgets, c’est autant d’argent en moins pour la prévention, l’évaluation des actions, ou le soutien aux communautés les plus vulnérables. Déjà, les réductions budgétaires affectent la prise en charge des toxicomanes, menaçant de déstabiliser plus encore des personnes en grande précarité.

Les progrès majeurs dans la prévention du VIH sont porteurs d’espoir, au Canada comme ailleurs. Dans les prochaines décennies, on pourrait atteindre un objectif de « zéro infection », défini par l’ONUSIDA. Mais pour être suivies d’effet, ces bonnes nouvelles doivent pouvoir s’appuyer sur des stratégies de santé publique fondées sur les preuves scientifiques, et financées à la hauteur des besoins. Pour enrayer l’épidémie de VIH/sida, il ne saurait être question de sacrifier la santé des populations au nom de l’austérité budgétaire ou de la morale.