Un court billet pour souligner la Semaine nationale de la santé mentale, dont le thème est cette année : « Prendre une pause, ç’a du bon ». L’occasion pour les médias de s’alarmer sur la consommation d’anti-dépresseurs au Québec… Mais pas vraiment de s’interroger en profondeur sur les déterminants sociaux du mal-être psychologique. La thématique de l’épuisement professionnel (ou « burn out ») se prête pourtant particulièrement à un questionnement des relations de/au travail !

Une question qui a une résonance particulière à l’entrecroisement des univers dans lesquels j’évolue : le milieu associatif et le milieu de la recherche. Deux mondes concernés de plein fouet par un reformatage néolibéral.

Malaise académique…

Il y a quelques semaines, j’ai relayé sur les réseaux sociaux un article en anglais sur la santé mentale dans le monde académique. Autant dire que cette diffusion a déliée les langues dans mon entourage ! L’article analyse la culture compétitive qui domine dans les universités : élitisme, stress, surmenage, individualisation de l’échec, brouillage des frontières entre travail et vie privée, échéances intenables, etc. Les auteures pointent également l’absence de soutien dont bénéficient les chercheur-e-s dans leur propre milieu. L’intériorisation collective des normes compétitives sapent les mécanismes de solidarité, ou même les efforts pour faire son travail « autrement ».

Les Universités comme institution, et les chercheurs/professeurs en poste, ont une grande part de responsabilité dans cette situation. Car les problèmes de mal-être et de santé mentale touchent particulièrement les personnes qu’ils/elles encadrent, à la maitrise ou au doctorat, et les précaires du monde universitaire (post-doc, contrats de recherche, etc.). Le monde académique produit et reproduit des standards de fonctionnement qui, non seulement excluent et déprécient ceux qui ne supportent pas la pression (démesurée), mais appauvrissent du même coup la créativité scientifique.

Alors d’accord, prenons au sérieux le thème de la journée et organisons des pauses : le temps nécessaire pour se parler, s’entraider, et pour imaginer une autre université !

Et souffrance associative

Un article récent du Monde Diplomatique (malheureusement pas encore disponible en ligne) s’est intéressé aux conditions de travail dans le monde associatif. Des constats rendus très sensibles par la crise que traverses actuellement la lutte contre le sida en France. Une crise qui se traduit par des licenciements ou des menaces de fermeture, bien sûr. Mais plus globalement, c’est la raison d’être de l’activité associative qui est mise en péril.

On ne mesure pas toujours assez à quel point, même sans être licencié soi-même, le fait de subir un plan « social » mine l’estime de soi et l’envie d’agir collectivement, en particulier dans le monde militant. Et plus généralement, un peu comme dans le monde académique, les salarié-e-s associatifs de première ligne sont aux prises avec une précarité consentie au nom d’un idéal et des valeurs qui y sont associées.

Là encore, la culture organisationnelle est déficiente. C’est d’autant plus préoccupant s’agissant d’associations dont l’objet est, en l’occurrence, de prendre soin et de soutenir les personnes concernées par une maladie chronique. Dans ce cadre, « prendre une pause » est sans doute l’occasion de réfléchir à une autre façon de faire du commun dans la lutte contre le VIH/sida et dans le milieu associatif. Et si, par exemple, on appliquait des principes de l’action communautaire à l’organisation des relations de travail : horizontalité, démocratie participative et transformation sociale ?